On n’aime pas assez les lieux lorsqu’ils sont présents.
On ne mesure pas le prix de la lumière sur la table du dîner, la douceur de l’ombre de l’arbre, la bonté du jardin potager, la beauté des crépuscules quand l’hiver recule
et le miracle de chaque pas dans le couloir.
On n’aime pas assez les êtres qui vivent là, qui passent de la chambre au salon, comme une évidence qui est en vérité une grâce.
On croit que l’éclat des journées demeurera toujours dans la mémoire.
Mais lorsque les lieux et leurs êtres ont disparu,
lorsqu’ils se sont tous évanouis comme des bulles dans la nue,
on les regrette tant qu’ils nous hantent.
Parfois, bien sûr,
l’un de ces souvenirs familiers nous retrouve,
tel un foulard qui attendait sur un sentier rarement emprunté
la main qui l’avait perdu…
Mais à peine croit-on le saisir,
qu’il s’échappe sans se laisser retenir,
et il nous semble alors
qu’il ne nous a jamais appartenu…
Géraldine Andrée