J’entends
une voix
de l’autre côté
du temps.
Elle me raconte
cette tiède
journée
de printemps :
une calèche
qui s’arrête
dans une rue de Hayange,
le cheval qui s’ébroue,
une bottine
blanche
qui se pose
sur la marche,
et devant les yeux
du jeune homme,
cette jeune femme
apparaissant
en toilette
du dimanche.
Voici les rubans
du chapeau
qui ondulent,
qui ondoient
au vent,
comme remués
par une invisible
main
d’enfant.
Et ce baiser
dans la rue
qu’ils échangent
pour la première fois !
Qu’importent les convenances !
Les fiançailles
sont pour bientôt,
quelques semaines
tout au plus.
On est en l’an
mille neuf cent quatorze.
L’odeur
de la cigarette
se mêle
à la senteur
de la violette,
me dit la voix,
ô ce baiser
sur les lèvres
entre l’ombre
et le soleil,
cette promesse
avant que le promis
ne disparaisse
dans un combat
qui n’était guère le sien…
La promise
était ta grand-mère.
Souviens-toi !
Une voix
me parle
de l’autre côté
du temps.
Géraldine Andrée