Si tu tends bien l’oreille vers le poème
tu entendras chuchoter au soleil
deux chemins qui se rencontrent
quelque part dans un rêve
que fait pour nous le monde
Géraldine Andrée
Si tu tends bien l’oreille vers le poème
tu entendras chuchoter au soleil
deux chemins qui se rencontrent
quelque part dans un rêve
que fait pour nous le monde
Géraldine Andrée
Silence
Page destinée à la fleur
d’un poème
Géraldine Andrée
Je suis riche de tous mes cahiers, qu’ils se présentent sous les titres de Cahiers du matin, Cahiers de l’âme, Carnets de gratitude, Journaux à bulles.
Il y en a de tous les formats – de celui que je glisse discrètement en promenade dans ma poche ou dans mon échancrure à fleur de coeur à celui qui, déployé comme une corolle, recouvre la moitié de ma table.
Cahiers de moleskine à la couverture noire entourée d’une lanière extensible, cahiers souples Clairefontaine, cahiers fleuris de midinettes qui se ferment avec une petite clé dorée… Pages surlignées, quadrillées, piquetées, ou blanches telle une belle matinée de printemps…
Papier de texture épaisse, voire cartonnée, pour mes plus intimes secrets ou si fine que l’encre de mes mots y transparaît au verso comme si je me regardais dans un lointain miroir…
Quand je feuillette tous ces cahiers remplis, je prends à rebours les chemins de ma vie et je m’aperçois qu’ils sont bien souvent détournés.
Je voyage d’une humeur à l’autre. Mon écriture se fait douce, lente et régulière comme la rivière de mon enfance, puis soudain elle s’accélère, tourne sur elle-même, se perd dans ses méandres et je reconnais à ses saccades et à mes taches d’encre mon halètement, mes trébuchements. Une virgule, un point ont été perdus en cours de route, la syntaxe de la phrase est en suspens, ouverte encore, bien que le paragraphe soit achevé, sur tous les possibles.
Je découvre parfois dans la reliure des miettes égarées de pain ou de gâteau sec ou encore le cercle d’une goutte de thé versée à côté…
A la fin de ma vie sonnera l’heure où je me dirai peut-être que j’ai tout écrit.
Alors, je prendrai un fil quasi infini et je relierai ensemble tous ces cahiers que je ne peux relire dans leur totalité. Ce sera, pour ceux qui voudront découvrir l’inconnue que je fus, l’Anthologie de mon Âme.
Géraldine Andrée
J’arrive à l’ultime page de ce cahier qui m’a accompagnée pendant toute une année.
J’écris ces dernières lignes avec regret, comme si je quittais un pays que j’ai beaucoup aimé.
Je me souviendrai longtemps des feuillets lisses, décorés et quadrillés, des traits fins pour m’inciter à dépasser chaque jour mes peurs et mes limites.
Bien sûr, mon aventure se poursuivra avec un autre cahier. Mais j’éprouve toujours un pincement de coeur quand je referme un journal intime qui est le dépositaire de toute une période de ma vie.
Tristesse, joie, espoir… De cahier en cahier, de feuille en feuille, les saisons passent…
Je songe à mon état d’esprit lorsque j’ai débouché mon stylo pour inscrire la date en haut de la première page, dont la blancheur brillait dans le matin.
Je ne savais pas que vingt pages plus tard, je vivrais un déménagement, une mutation ; que trente pages plus loin, le deuil me frapperait ; qu’après quarante pages de chagrin, ma guérison débuterait, aidée en cela par les connaissances de mon âme libre de naissance.
Dans la neige du papier, un chemin s’écrit toujours. Et si le chemin était déjà tracé par la destinée ? Et s’il suffisait de le deviner puis de l’esquisser avec la pointe de la plume?
Dans ce cahier déjà achevé, il y a tant d’idées, de projets, de rêves, de désirs encore non accomplis !
Au coeur de l’été qui s’annonce, je soulignerai avec des feutres de couleur tous ces voeux et je composerai un recueil de mes possibles lendemains. Faire un bullet-journal de ce qui demeure en attente dans ce bullet-journal. Preuve que j’ai toute une vie à vivre puisqu’il me reste tant de cahiers à écrire, le suivant n’étant que la continuité du précédent…
Quand je serai bien vieille – et donc quand le fil de ma vie sera sur le point de se briser -, je les coudrai ensemble avec un seul fil incassable.
Voici, cher lecteur, l’anthologie de mes chers moments vivants…
Dans ce journal, je découvre que j’ai été fidèle aux valeurs d’authenticité et de bien-être et que les grandes lignes de mon dessein ont été suivies.
Malgré les ruptures, les bouleversements, j’ai réalisé ce qui m’importait – l’écriture autobiographique, le développement personnel et spirituel, mes études en art-thérapie.
J’ai pu exorciser mes anciennes douleurs dans le récit de mon enfance ; j’ai obtenu mon premier module de Psychologie ; j’ai tenu un cahier poétique de la traversée de mon deuil ; j’ai noté les gratitudes que m’offrait mon installation dans un nouveau département… Et surtout, j’ai toujours gardé en tête le Projet… d’avoir des projets !
Cette ultime page où je fais le bilan du tracé de ma voie est la plus importante.
Alors, en signe de remerciement, j’y appose cette phrase du célèbre écrivain Henry Miller qui pourrait servir d’exergue à mon futur cahier ainsi qu’à tous ceux qui débutent un journal
« N’oubliez pas de ne pas oublier »
pour donner à la vie une mémoire
et pour donner à la mémoire une vie.
Géraldine Andrée
Avant de raconter sa vie en long et en large,
honorer l’accueil du cahier
où l’âme peut s’étendre,
prendre toute la place,
se réchauffer grâce
à la flamme blanche
du papier
sur laquelle les mains s’ouvrent
et que la lampe
met bien en évidence.
Je te remercie, page de ce jour,
de m’accepter inconditionnellement.
Géraldine Andrée
ET CELA ME PLAÎT !
Géraldine Andrée
Ecris-toi des lettres, le plus souvent possible !
Prends du beau papier, du vélin doux pour ta plume.
Inscris ton nom tout en haut de la page commençant par Cher(e)…
Demande de tes nouvelles. Décris comment tu te portes. Confie tes peines, tes joies, tes espoirs ; ce qui te met du baume au coeur ou te bouleverse.
Raconte tout ce qui a de la valeur à tes propres yeux, ce rayon de soleil sur ta chaise, le bâillement de ton chat qui te permet de voir sa langue rose, la floraison de la plante que tu aimes. Inscris tes projets comme s’ils étaient déjà actuels pour t’encourager à les réaliser pleinement.
Donne-toi des conseils venus de la source la plus sûre de toutes les connaissances : ton âme. Adresse-toi à toi avec bienveillance, générosité, non-jugement. Partage avec toi les moments de grâce ou de doute. N’oublie pas ! Tu es cet(e) ami(e) intime qui t’écrit !
Ensuite, plie la lettre ; glisse-la dans une enveloppe ; colle un beau timbre ; note avec soin tes coordonnées.
Quand tu recevras cette lettre quelques jours plus tard, ouvre-la lentement. Ecoute crépiter le papier qui se déchire, se déplie. Regarde la lumière du matin se refléter dans l’encre des phrases qui t’apaisent et t’orientent sur ton chemin d’aujourd’hui.
Toi, lisant et écrivant à la fois,
ne sens-tu pas comment
la partie vivante de toi-même,
s’adresse à cette autre partie
vibrante elle aussi,
en attente
d’être lue, reçue, comprise,
accueillie ?
Ecris-toi des lettres le plus souvent possible !
Géraldine Andrée
Comment savoir si je vais bien ?
C’est parfois si peu évident !
Alors, je le demande à la page au lever du soleil
et ce sont des conseils à l’encre claire qui apparaissent
comme
Bois beaucoup d’eau,
laisse une mèche de libre pour le souffle de la brise d’aujourd’hui,
suis le chemin de ton intuition,
écris-moi davantage
ou tout simplement
RESPIRE !
Tu as tout le temps.
Le ciel ne disparaîtra pas derrière ta fenêtre.
Quelle chance que tu as d’être !
Géraldine Andrée
Et Vous ?
Géraldine Andrée
Sur la page
du ciel
une phrase
infinie
et une seule
virgule
qui se déplace
selon le sens :
l’oiseau
passe.
Ne cherche pas
à en lire
davantage,
l’oiseau
est le seul
message.
Géraldine Andrée