Donnez-moi un poème rien qu’un poème pour que le sentier de l’enfance vienne à ma rencontre que j’épouse le chant du vent et que je le pose sur mon coeur avec la foi en la trace qui s’annonce
Donnez-moi un poème pour que je sois le témoin de l’aurore où une étoile tremble encore et que je commence chaque phrase de lumière par une majuscule qui danse
Le soir, avant de m’endormir, je demande à mon père de me faire signe.
J’attends quelques instants ; je respire.
Puis, j’ouvre mon anthologie de poèmes regroupés par jour, par saison, comme dans un agenda de floraison.
Et un poème vient à ma rencontre. C’est, souvent, un poème qui évoque l’automne, où mon père est né et mort.
J’entre alors, corps et âme, dans « les eaux du temps » de Maurice Carême, « les taffetas morts » et les flammes levées des lampes de Luc Bérimont, « le sourd frémissement des forêts » de Théophile Gautier. Je comprends ce que signifie l’absence, et les frêles lueurs qu’elle laisse dans le temps.
Je lis et relis, par exemple, les Pensées d’automne du 10 novembre, date à laquelle mon père a donné la main à son ombre.
Puis, un autre signe m’est envoyé. Le soir de la journée du 30 mars qui s’achève pour moi, le poème LesHirondelles, extrait du Livre de mon père d’Emile Henriot, rend mon âme légère comme des ailes qui reviennent.
C’est ainsi qu’éclot dans ma solitude une grande certitude :