Les jours où je me consacre entièrement à l’écriture, je porte mon parfum préféré, mon parfum merveilleux et inspirant, qui mêle les senteurs de la mandarine, du miel, du jasmin avec les deux notes enlacées du gardénia et de la fleur d’oranger en son cœur.
Je le vaporise dans mon col de laine tout en songeant à l’idée précise d’un poème.
Et j’avance au fil de l’encre qui fleure bon la terre des sous-bois
vers la vanille des gâteaux, les bâtons de réglisse, le livre emprunté à la bibliothèque de la plage, le cuir de mon cartable, l’herbe trempée par la rosée dont la lumière du matin est tout infusée, le lait pour la peau de bébé, le savon de Marseille qui éclaircit le linge, le foin coupé, la peinture à huile, la colle qui relie les pages de mon premier journal intime que je me suis artisanalement fabriqué.
Le parfum de ma journée d’écriture m’invite à écrire sur d’autres fragrances de mon enfance.
C’est ainsi que je peux débuter une biographie avec vous. Il suffit d’une seule odeur qui vient – celle du pain chaud, par exemple, de la mandarine ouverte, de la cire qui fond sous la flamme, au cœur d’un Noël très ancien –
pour que le récit de votre vie,
la vie de votre récit
commencent.
Géraldine Andrée