J’écris chaque jour
en prêtant attention
à l’encre brillante
de mes mots
comme je me penchais
jadis
sur l’éclat
des jeunes pousses…
J’écris chaque jour
pour demeurer
fidèle
au jardin.
Géraldine Andrée
J’écris chaque jour
en prêtant attention
à l’encre brillante
de mes mots
comme je me penchais
jadis
sur l’éclat
des jeunes pousses…
J’écris chaque jour
pour demeurer
fidèle
au jardin.
Géraldine Andrée
Revenir à ce journal,
c’est comme revenir à la source après une longue période de soif,
c’est me remettre à l’écoute de mon écriture au murmure de sang,
c’est me laisser porter par le courant de l’encre,
c’est ranimer la lumière du présent dans mes mots qui sèchent,
c’est me rendre à l’évidence :
l’éclat de mes larmes et de mes rires
a pour soeurs ces étoiles
qu’une nuit d’été
dévoile.
Géraldine Andrée
Un rien
annonce
l’automne :
trois points
roux
sur les prunes,
l’herbe
qui s’incline
et parsème
la ligne
du chemin
de virgules
tremblantes
sous un soupir
qui se brise…
Un rien
annonce
le silence :
des points
de suspension
alors
que la phrase
s’élance
encore,
un espace
minuscule
comme
signe
que la page
se termine…
Et voilà
que malgré
l’attente
d’une suite,
tout
est écrit !
Mais
il suffit
d’un battement
de cil
pour reconnaître
la palpitation
des feuilles
d’une nouvelle
saison…
Un rien
suffit
pour désigner
le point
du jour
à l’horizon…
Un clignement
de l’oeil
qui encourage
ce souffle
en chemin
vers son message…
Géraldine Andrée
Il n’y a pas de carte postale pour le pays où tu es parti.
Alors, j’y mets les lumières, les herbes et les ciels que j’imagine.
Pour tes promenades, je veux un chemin de terre fine,
pour tes baignades, un reflet d’émeraude entre deux collines,
pour ton repos, le balancement d’une note argentine sur l’air d’une blanche matinée,
et puisque rien ne me dit que les ailes des oiseaux qui reviennent du Sud
pour la brève saison d’ici
m’apportent l’un de tes signes,
je signe mon poème avec ton nom.
Je fais ainsi de mon rêve une certitude,
et de ton absence un pays.
Guy
Géraldine Andrée
Je remercie Monsieur V. d’avoir été le messager de mon grand-oncle Stéphane de Zalewski, noble d’origine polonaise, mort juste après la Deuxième Guerre Mondiale pour avoir eu le coeur brisé de chagrin.
Persécuté par les nazis, contraint à l’exil à Metz, il s’est vu ensuite spolier de tous ses biens à Varsovie par le communisme stalinien. Je comprends mieux maintenant la signification du foulard rouge que je dois retrouver dans la maison familiale.
J’ai toujours su que ce grand-oncle vivait près de moi, qu’il ne me quittait pas. Très souvent, je prononce son nom. Une nuit, il m’a montré en rêve sa ville natale, Varsovie, que je visiterai en cette vie, c’est promis. J’entrais à l’intérieur de sa demeure qui appartient désormais à d’autres. Je me chauffais à son feu qu’il avait allumé pour moi. Je dois faire beaucoup de voyages et la Pologne, avec des villes comme Cracovie et Varsovie, figure en tête de ma liste.
Stéphane était passionné par les livres, la littérature, l’étude, tout comme moi. Souvent, je retrouve des pages de livres anciens soulignées et annotées de sa main, une écriture fine et élégante, comme sa prestance, et aussi cette signature alerte – Stéphane.
Je suis reconnaissante de savoir que c’est lui l’auteur de ces murmures près de mon coeur et de ces connaissances qu’il insuffle à mon oreille intérieure.
Maintenant, je peux mettre un visage à mon intuition.
Si je recueille suffisamment d’éléments biographiques, ici, en Lorraine ou là-bas, en Pologne, j’écrirai le livre de sa vie.
Cet après-midi, j’ai renoué avec mes racines.
Merci !
Géraldine Andrée
Le deuil est l’expérience suprême du détachement.
Même si beaucoup d’actions demeurent en suspens,
il n’y a plus rien à faire.
Même si des mots ont été retenus, des paroles interrompues,
il n’y a plus rien à dire.
Quoi qu’on fasse, la vie est à jamais écrite.
Il n’y a donc plus rien à désirer.
D’une certaine manière, cette tristesse procure la paix.
Remords et regrets peuvent durer des années, ils n’en seront pas moins inutiles
car ils ne feront pas revenir à soi les présents perdus.
On peut écrire de longues lettres à l’être disparu.
Seul notre coeur en connaîtra le contenu.
On peut faire sonner le téléphone dans la maison de jadis.
C’est le silence qui répond
ou une petite voix à l’intérieur de nous qui nous dit :
Tu sais tout ce qu’il faut savoir !
Il n’y aura pas de nouvelles ce soir, ni demain, ni plus tard.
Tout a été déposé dans ta mémoire.
Il semblerait, bien sûr,
qu’à la manière avec laquelle une flamme de bougie tremble
le défunt nous entende…
N’a-t-il pas spécialement placé pour notre regard
cet iris bleu au centre de l’or ?
Ne serait-ce pas son oeil, en cette lueur, qui nous contemple ?
C’est possible.
Une telle éventualité aide à vivre.
Alors, on place sa conscience
dans la caresse d’une brise, le frôlement d’un oiseau, l’éclat d’un flocon
pour retrouver celui qui s’en est allé.
Il n’y a, certes, plus rien à changer dans l’existence qui suit son cours.
Mais une chose importante nous métamorphose :
on est plus vigilant, dans notre quête de l’absent,
à l’instant présent.
Dès lors, on quitte la rive trop connue.
Et de brasse en brasse, dans l’océan de la solitude,
on se dirige vers la rive qui nous fait face.
Quand le courant se fait trop fort, on épouse le caprice de la vague.
On embrasse la violence du manque
et lentement l’on se rapproche
d’une terre où de nouvelles lueurs espèrent l’attention de notre regard.
Bientôt, on y posera le pas.
Et on ne le regrettera pas.
Pour celui qui demeure,
le deuil est l’expérience suprême du départ
vers une vie autre
où tout reste à écrire
pour qu’il existe une suite
aux phrases interrompues
qui rendra enfin possible
une myriade de lendemains.
Géraldine Andrée
Pour mon histoire douloureuse,
pour la chronologie de mes peines et de mes trahisons,
je choisis ce carnet
dont la texture est veloutée comme du lait de naissance,
la reliure blanche comme un drap entrouvert au matin,
la page légère comme un voile de berceau qui miroite sous le souffle du printemps,
le grain du papier doux comme une paume guérisseuse.
J’élis entre tous un carnet tendre
pour me reposer, m’apaiser, reprendre confiance,
m’abandonner sans crainte au secret de tout ce qui se dit sous la pointe de mon stylo bille
qui retracera, j’en suis sûre,
l’origine de la blessure
en y effaçant la douleur.
Géraldine Andrée
Comment savoir si je vais bien ?
C’est parfois si peu évident !
Alors, je le demande à la page au lever du soleil
et ce sont des conseils à l’encre claire qui apparaissent
comme
Bois beaucoup d’eau,
laisse une mèche de libre pour le souffle de la brise d’aujourd’hui,
suis le chemin de ton intuition,
écris-moi davantage
ou tout simplement
RESPIRE !
Tu as tout le temps.
Le ciel ne disparaîtra pas derrière ta fenêtre.
Quelle chance que tu as d’être !
Géraldine Andrée
Géraldine Andrée
A chaque mot sur la page
ma main prend de l’âge
mais ce que j’écris
J’aime le reflet de la lune dans la rosée du chemin
demeurera toujours jeune
comme si c’était la page du tout premier matin
qu’invite un signe de ma main
Géraldine Andrée
