Publié dans Art-thérapie, C'est la Vie !, Grapho-thérapie, Journal de mon jardin, Mon aïeul, mon ami.

Le jardin de mon grand-père

En pleine guerre mondiale,
sous les salves de la mitraille
à Dunkerque,
mon grand-père maternel
a écrit dans son Journal :

C’est pour mon jardin
que je résiste.
C’est pour les jeunes pousses
qui existent
déjà dans un futur proche
que je survis.
J’ai un jardin à faire fleurir.
C’est pour cela que je me dis :
Ne meurs pas.

Mon grand-père m’a inculqué
la valeur
de croire en un jardin qui dépend uniquement de soi.
Pour moi, c’est le cahier de ce journal
que je tiens comme lui chaque jour
et dans lequel je réécris
ces paroles de foi.

***

Mon grand-père avait une vie très ordinaire :
arrosage des plantes, observation des semis, attente de l’éclosion des tomates.

Dans chaque case du calendrier, il prenait des notes sur la santé du jardin. C’était son journal de vie, en quelque sorte.

Pas d’héroïsme ostensible chez mon grand-père, mais une patience qui se voulait légère, une abnégation joyeuse, une force quotidienne.

Et c’est cet héroïsme anodin, respectant le rythme des fleurs, que je retiens.

Géraldine Andrée

Publié dans Ce chemin de Toi à Moi, Méditations pour un rêve, Mon aïeule, mon amie, Poésie

Les ciseaux d’une très vieille dame

J’ai retrouvé les ciseaux d’une très vieille dame
qui coupaient droit ou en biseau
de la soie du velours du taffetas
et qui allument des éclats d’argent à mes doigts
comme si j’étais celle de jadis

Les ciseaux n’ont pas changé
Ils brillent toujours autant en ce jour où je les manie
La nuit et l’oubli ne les ont pas ternis
Je glisse sous leur tranchant vif du papier d’aujourd’hui
et leur doux cliquetis

ressuscite
deux syllabes
de lumière
le prénom d’une aïeule
qui faisait des robes pour toutes les saisons à venir

Esther

Géraldine Andrée

Publié dans C'est la Vie !, C'est ma vie !, Journal créatif, Le journal de mes autres vies, Poésie

Un foyer

Un foyer

où l’on entend
crépiter 
le feu 
dans la nuit,

tinter
les notes 
de la pluie
sur les tuiles,

craquer les feuilles 
sous les souliers
de l’ami
qui passe le seuil…

Un foyer dont le couloir
se constelle
des pétales
des promenades,

dont miroirs
et tableaux
conversent
en silence

pendant qu’on mange
parmi les hautes herbes,
là-bas, à la lisière
de la clairière

et qu’on songe
chacun
en son secret :
Qu’est-ce

qu’ils se racontent
donc,
Louise
et le miroir

entouré
de perles ?
Qu’importe !
Cela ne nous regarde pas !

Un foyer qui rutile
au soleil
quand juin met fin
à l’école,

dont les ustensiles
brillent
au réveil
dans la cuisine.

Un foyer
qui fleure bon
la lavande
que tu recueilles,

le miel
du marché,
la mie chaude
du pain

que tes mains
enveloppent
dans du linge
blanc

comme si c’eût été
un nouveau-né
dans ses langes
et que tu apportes

avec la carafe
de vin clair
pour le signe de croix
du dimanche.

Un foyer
dont la pendule
prend tout son temps
au-dessus

de la crédence,
bat la mesure
avec confiance
en la seconde suivante.

Un foyer
où il ne peut rien
t’arriver,
où la vie

touche
tout ce qui rit
et bouge
avec des gants de soie.

Ce foyer,
j’y retourne
encore une fois
ce soir.

C’est
ma mémoire.

Géraldine Andrée

Publié dans C'est la Vie !, Le journal de mes autres vies, Mon aïeul, mon ami., Mon aïeule, mon amie

Le retour

Arriver sur le seuil

Ôter les feuilles qui le recouvrent

D’un tour de clé

entrer dans le corridor

Sentir la cape fraîche de l’ombre sur les épaules

Voici le silence qui accueille le premier pas

comme un chat qui a attendu depuis longtemps

dans un demi sommeil

Le suivre et retrouver tout surpris dans la chambre

un rayon de soleil qui ressemble

à la mèche de la belle aïeule

Découvrir cette magie avec une telle évidence

qu’on se demande

comment on a pu être absent pendant autant d’années

alors que la maison gardait pour elle seule toute sa présence

Et afin de se faire pardonner d’elle

décider que l’on va demeurer ici à jamais

pour faire refleurir

l’âme des dormeurs

sous chaque chose

un ruban

un couvercle de porcelaine

une soucoupe où furent ciselées

des guirlandes de roses d’or

dans un éternel bleu

où n’existe pas la mort

car tel

est le rôle

essentiel

de ceux qui restent

 

Qu’ils se souviennent

pour la prochaine

aurore

 

Géraldine Andrée

Publié dans Actualité, C'est la Vie !, C'est ma vie !, Mon aïeul, mon ami., Mon aïeule, mon amie, Parlez ! Je vous écoute !

Comment se passe, concrètement, l’écriture d’une biographie ?

Ecrire une biographie est un beau projet mais il peut sembler abstrait, surtout s’il est de longue haleine… Concrètement, comment cela se passe-t-il ?

Vous me contactez par le formulaire de contact de ce blog ou par téléphone.

Ensemble, nous cernons le motif de votre écriture biographique (rendre hommage, laisser une trace, léguer un patrimoine immatériel à ses descendants, mieux se comprendre à partir de ses ancêtres).

Nous avons ensuite un entretien soit à mon domicile s’il est proche de chez vous, soit au vôtre s’il est proche et accessible, soit par téléphone, soit par Google Hanghouts ou par Skype pour les longues distances, de région à région, de pays à pays et pour vous éviter d’avoir à payer un prix aux kilomètres que je parcourrais pour venir jusqu’à chez vous, ce qui se révélerait très vite exorbitant – sauf si vous tenez à ce que l’entretien ait lieu dans votre cadre.

Ensemble, nous prenons le temps. Vous prenez le temps de faire remonter les souvenirs et moi, je prends le temps de vous écouter. Ne vous souciez pas de l’ordre de ces souvenirs. Laissez-vous guider par le flux de votre mémoire. Elle sait très bien ce qu’elle fait. Les images ne surgissent jamais par hasard. Si vous avez des trous de mémoire, je peux vous aider à la relancer à partir d’un détail anodin – une couleur, une plante, un nom – ou à partir d’un visage, d’un épisode, d’un lieu.

Je prends des notes de ce que vous dites. Et si vous l’acceptez, je vous enregistre.

Vous payez ensuite l’entretien et la séance d’écriture à venir via Ma boutique ou par ma page Paypal .

Je rédige la séance d’écriture et je vous la propose – soit par envoi électronique, soit par courrier ; dans ce cas, des frais d’impression et d’envoi sont ajoutés, de 5 à 10 euros – tout dépend de la distance et du poids.

Vous me suggérez les éventuelles modifications nécessaires.

Je vous renvoie le texte modifié dans les mêmes conditions que celles décrites ci-dessus.

Lorsque vous vous sentez prêt pour une nouvelle séance, vous reprenez rendez-vous.

 

Une biographie demande de l’investissement – en temps et en argent.

Mais sachez que c’est vous qui définissez votre rythme d’écriture.

Vous êtes libre de poursuivre ou d’arrêter à tout moment.

Aucun contrat ne vous engage sur la durée.

Vous ne payez aucun forfait mais à la séance.

Une séance se compose d’une heure d’entretien à 50 euros et de l’écriture qui suit à 50 euros. Vous dépensez donc à chaque fois 100 euros.

Si vous voulez faire double séance (deux heures), vous payez 200 euros.

Vous ne payez pas d’avance mais au fil des séances. Je n’applique aucun forfait.

Si vous souhaitez un devis, en cas de travail particulièrement intense, c’est possible mais vous paierez toujours à la séance. Pour information, sachez qu’une biographie complète de 250 pages environ demande 25 séances, soit 2500 euros en tout, mais toujours en paiement fractionné au rythme des séances.

Vous êtes donc libre de disposer de votre temps et de votre argent, de gérer cet investissement comme bon vous semble. Le travail biographique avec moi ne vous emprisonnera pas car les valeurs de la liberté me sont chères.

C’est votre vie que j’écoute et que j’écris.

Je restituerai toujours votre voix – jamais la mienne et ce, dans un constant souci de fidélité envers vos souvenirs.

Si vous souhaitez publier votre biographie, c’est tout à fait possible. Je peux le faire pour vous, soit par le biais de la création d’un blog , soit par auto publication (par e-book ou livre Broché). J’ai déjà publié moi-même certains de mes propres livres et des sites comme Amazon, Chapitre ou des maisons d’édition alternatives comme Edilivre proposent ces services gratuitement.  Je m’occupe, en ce cas, de la mise en page et de l’envoi, sauf opposition de votre part. Si vous souhaitez passer par un éditeur classique, c’est possible aussi mais les chances de publication sont plus aléatoires.

Je reviendrai sur nos droits d’auteur dans un autre billet intitulé Charte.

Je vous souhaite de tracer avec plaisir votre vie au fil de ma plume !

A bientôt,

à la fenêtre des mots !

 

Géraldine Andrée

L’Encre au fil des jours

 

Publié dans Berthe mon amie, C'est la Vie !, C'est ma vie !, Cahier du matin, Ce chemin de Toi à Moi, Mon aïeule, mon amie, Poésie

Les mains de ta grâce

Je me souviens
de la grâce
de tes mains :
lorsqu’elles passent

le chiffon
sur la glace
de la grande
armoire,

elles déposent
un voile
de noces
sur toute chose

dont on voit
battre
le coeur
en transparence

et elles déroulent
autour
des ailes
de leurs gestes

un tissu
de silence
aussi subtil
que la brume

des aurores
qui révèle
l’or
des collines.

Je me souviens
de tes mains
pleines
de grâce

et je voudrais
trouver
un mot
qui leur redonnerait,

tel un miroir,
fidèlement
vie
dans ma mémoire,

mais c’est la tige
vibrante
d’un chant
qui monte

de mon cœur
à ma gorge,
comme si tes mains
la faisaient éclore

à chaque instant
qui compose
ton immense
silence.

Géraldine Andrée

Tous droits réservés@2017

 

Publié dans Berthe mon amie, C'est la Vie !, C'est ma vie !, Le cahier de mon âme, Mon aïeule, mon amie, Toute petite je

On est presque au Nouvel An !

J’avais à peine six ans.

J’avais été comblée de cadeaux.

Je me souviens :

ma grand-mère assise près de la fenêtre, dans le rayon bleu gris d’une fin d’après-midi de Noël.

On n’avait pas encore allumé les lampes.

Ma grand-mère portait son pull fleuri avec lequel elle est partie dans un lointain pays.

Soudain, nos éclats de rire d’enfants se sont éteints, comme si nous savions…

Les mains de ma grand-mère, tout étoilées de fleurs de cimetière, se sont levées à la hauteur de son coeur et je l’ai entendue dire, en joignant à la parole ce même geste vif qu’elle faisait lorsqu’elle cueillait des herbes folles :

-Cela va si vite ! On est presque au Nouvel An !

Que de nouvelles années se sont écoulées depuis ces mots…

Aujourd’hui,

en cette fin d’après-midi de Noël,

il est un rayon bleu gris

qui ressemble à celui de jadis,

tout près de la fenêtre.

Le temps est presque prêt pour que ma grand-mère vienne s’asseoir à la fenêtre

et chuchote en silence ces deux paroles uniques qui enjambent tous les jours de ma vie

depuis le lointain Noël de mon enfance :

– Cela va si vite !

On est presque au Nouvel An !

 

Géraldine Andrée

 

Publié dans Berthe mon amie, C'est la Vie !, Ce chemin de Toi à Moi, Mon aïeule, mon amie

Tu as toujours aimé les orages

Toi, si calme, si discrète, tu as toujours aimé les orages.

Tu te réjouissais d’entendre cette cavalcade qui franchissait la colline.

Tu allais au-devant de l’éclair qu’annonçait ce solennel roulement de tambour.

Jeune fille, tu te précipitais à la fenêtre pour assister au vif concert de la grêle, à la violente symphonie des cordes de la pluie. Ton visage était là, juste derrière la vitre giflée par l’eau.

Tu as écrit dans ton carnet d’adolescence : « C’est le spectacle qui termine une journée morne. »

Après le passage de l’orage, tu contemplais le jardin bouleversé : les arbres échevelés, les pétales détachés des fleurs et qui jonchaient l’herbe, le carré de roses piétiné.

Mais cela ne t’inquiétait pas : tu savais que le jardin reprendrait de la vigueur dans la lumière du lendemain matin et que s’il s’ébrouait longuement dans le vent, c’était parce qu’il soignait l’ultime étape de sa toilette.

 

Toi, si pudique, tu aimas passionnément. Ton coup de foudre pour André marqua ta vie à jamais. Chaque nuit, dans la solitude de ta chambre, tu rêvais de ton union avec ce garçon doux qui jouait du violon à la perfection.

Hélas ! L’orage de la guerre brisa ton grand amour. L’éclair blanc d’une lettre t’annonçant un soir de printemps son décès au front de Verdun te fendit le coeur.

Tu appris à vivre avec ce deuil qui allait changer définitivement le cours de ta vie.

 

Toi, si aimante, tu te résignas à un mariage de raison avec un ingénieur qui te délaissa vite pour des filles au café. Tes jours étaient rythmés par les orages silencieux de l’adultère. Tu fermais les yeux. Il est impossible de détourner la course du Destin. Tu t’habituas avec ta douceur coutumière au ciel morne de ton existence.

Guère douée pour la révolte, tu ne déclenchas aucun orage.

 

Je suppose que certains soirs, devant ton miroir, tu te surpris à espérer un miracle qui pourrait te délivrer de cette vie non choisie, à  croire en l’apparition fulgurante d’un autre homme sur le cheval de la chance et qui t’emmènerait loin de ta propre image.

Tu égrenais souvent le chapelet. Tu savais que Dieu était capable de faire surgir de sa main bien des orages salvateurs.

Mais ce ne fut qu’une prière. Si cette dernière avait été exaucée grâce à l’ardeur de ta dévotion, aurais-tu vraiment suivi l’élan de ton coeur ?

Tu n’avais pas été éduquée pour prendre une semblable décision.

L’éventualité d’un tel orage t’attirait en même temps qu’elle te faisait peur.

Puis, les enfants te firent oublier ton désir de liberté.

 

La fougue de ton âme, tu l’as confiée à tes cahiers intimes.

Tu savais qu’ainsi, cela ne prêterait jamais à conséquence.

Toi, si docile, tu fus cette poétesse ardente qui m’offre aujourd’hui dans tes pages la sève du jardin perdu de Montmorency comme si c’était ton sang, le baume de la lumière mêlant les senteurs de la terre après l’averse, le regard qui luit une fois le chagrin passé, le souvenir du pétale de ce très ancien baiser sur ton visage.

Oui, à ta façon de me faire la louange de la Vie,

je vois

que tu as toujours aimé ses orages.

 

Géraldine Andrée,

Ta petite-fille

Publié dans C'est la Vie !, Cahier du matin, Mon aïeul, mon ami.

Les hivers de jadis

Ils étaient rudes, les hivers de jadis, bien plus rudes que ceux d’aujourd’hui.

Mon Grand-Père, instituteur à l’école communale, se levait trois heures avant le début des cours pour réchauffer la salle de classe.

Une par une, il posait les branchettes dans le ventre du poêle.

Puis il approchait l’étincelle. Les flammes montaient haut mais la chaleur demeurait circonscrite autour de l’appareil.

Il faudrait beaucoup de temps pour qu’elle enveloppât toute la salle. Les vitres étaient étoilées de givre.

Mon Grand-Père notait à la craie en haut du tableau noir :

Aujourd’hui, jeudi 14 décembre 1939.

Tout était blanc : la date, les fenêtres, les chemins et les prés aux alentours noyés dans la brume.

A huit heures moins cinq, une cavalcade retentissait dans les couloirs.

Les écoliers rentraient avec leurs bonnets, leurs manteaux et leurs souliers mouillés. Certains venaient de loin et avaient marché longtemps.

Leurs haleines, mêlées à l’humidité de leurs vêtements, embuaient les vitres.

Ils ne se dévêtaient pas tout de suite car la température ne s’élevait guère.

Les encriers restaient gelés.

Grand-Père consacrait ce temps où il était impossible d’écrire au cours de morale et à la récitation des leçons.

Quand j’ai lu Le Grand Meaulnes d’Alain Fournier pendant mon adolescence, j’ai retrouvé sans y avoir jamais été assise la salle de classe de mon Grand-Père éclairée au coeur de l’hiver. Le silence était tel qu’hormis la voix de l’écolier qui restituait sa leçon devant le maître, on entendait craquer le poêle à bois.

Vers dix heures enfin, l’encre avait des reflets scintillants.

On pouvait commencer la leçon du jour.

On enlevait ses gants.

Chacun trempait sa plume.

Il y avait beaucoup de ratures car le contact de la feuille avec la main réveillait la douleur des engelures.

Puis la guerre éclata. L’école de Grand-Père ferma pendant toutes les années d’Occupation où le froid fut si mordant.

Ma mère a eu mon Grand-Père comme instituteur.

Elle m’a montré un soir son cahier du Cours Moyen.

Le papier a bien pâli. Les mots cheminent sur une ligne invisible. A certains bouts de phrases, les lettres s’effacent dans la neige de la page.

Mais si j’approche cette dernière de mes yeux, je peux voir en transparence le feu qui tremble dans le poêle, l’encre qui luit, la blancheur triste du jour et le noir pétale d’une tache d’encre sur les doigts encore gourds.

Géraldine Andrée

Publié dans Berthe mon amie, C'est la Vie !, Mon aïeul, mon ami., Mon aïeule, mon amie, Poésie

Depuis ton dernier mot

Depuis ton dernier mot dans le jardin,

il y eut tant de gouttes de pluie au bord des yeux des fleurs,

tant de crépuscules qui ont coulé sur la collerette de la colline,

tant de paysages qui ont défilé derrière la vitre du train Saint-Brice – Saint-Amance,

tant de semailles et d’espérances,

tant de moissons dont les mèches d’or ont couvert à l’heure de la sieste la taie de l’azur,

tant d’abeilles chassées de la main quand suintaient les reines-claudes,

tant de feuilles foulées par les souliers,

tant de flammes qui ont crépité dans le poêle à bois,

tant d’étincelles de givre autour du houx,

tant de murmures de cette source cachée que l’on cherche toujours et qui se fait entendre dans la délivrance succédant au dégel,

tant de bourgeons prêts à enfanter leurs lueurs,

tant de feuilles et de pétales nouveau-nés,

tant de pain béni et coupé,

tant de nourrissons qui ont grandi, tant d’amours quittées, tant de rencontres, de lettres écrites, d’attentes, de réponses – ou d’abandons,

tant de pages pour une vie,

tant d’autres mots aussi,

et puis le nom de ce pays

que seuls ceux en partance purent lire

sur un panneau invisible…

Pourtant, il me suffit de prononcer ton mot unique

parce qu’il fut l’ultime,

il me suffit, oui,

de le porter sur mon souffle qui s’évanouit à l’instant même dans l’air,

pour que je retrouve les ailes de cette phrase qu’il acheva,

et qui vole désormais plus loin que notre jardin

-au-dessus de toute la terre.

 

Géraldine Andrée