tu es la tige
dont je suis la corolle
ouverte
dans le jour.
Géraldine Andrée
tu es la tige
dont je suis la corolle
ouverte
dans le jour.
Géraldine Andrée
Ne te laisse pas intimider par la page dont la blancheur te fait douter de ton inspiration.
Ne te laisse pas enfermer par son cadre illusoire. Je sais, on t’a habitué à ne pas franchir les lignes, à ne pas déborder de la marge, à écrire comme on avance, c’est-à-dire droit.
Et pourtant, si je te disais que la page est un vaste endroit où tu peux prendre toute ta place ?
Si je te disais que la page est un océan dont les vagues, en ondulant, en ondoyant te mènent vers toi-même ?
Regarde la page. Elle est ton miroir, non pas un miroir où tu te juges avec sévérité, où tu ne repères que tes défauts, mais un miroir qui te permet de te rapprocher de toi, de te regarder dans les yeux pour y voir se révéler tes rêves.
Considère la page comme la possibilité d’un voyage où il n’existe
nul sens unique.
Commence par un mot – un seul – n’importe où, à droite, à gauche. en bas, en haut.
Réinvente tes points cardinaux. Écris au Sud, écris à l’Est.
Écris avec confiance ce que tu éprouves, ce que tu penses, qui tu es.
Imagine que ta plume signe chaque battement d’ailes d’un oiseau.
Sois, grâce à la page, ce grand espace où tu contemples ton passage.
Géraldine Andrée
Nulle promenade
aujourd’hui
Je veux seulement
à la lueur
de ma bougie
retrouver
dans l’anthologie
de mon enfance
ce poème
que j’ai tant aimé
jadis
et qui me regarde
entre deux feuilles
qui lui ressemblent
Géraldine Andrée
Un poème
de Li Po
m’invite à m’étendre
et à lire
cette phrase
que la page
du ciel
déroule
elle-même
pour mon regard
et dont chaque
mot
est un oiseau
Géraldine Andrée
J’aimerais que ma vie soit un long week-end.
J’approcherais mon visage de la flamme
après m’être baignée dans mon âme
puis je baptiserais d’un poème
chaque goutte d’eau
qui constellerait ma peau.
Un rire dans son éclat
m’emporterait vers une existence
où l’on ne meurt pas.
Et au moment de m’endormir
au creux de l’enfance,
un rêve accrocherait des ailes
à mon dos
pour que la joie qui se termine
recommence aussitôt.
Le temps, alors,
serait largement ouvert
comme un bras de mer
qui me bercerait
sans que sa force ne m’étreigne…
J’aimerais que ma vie soit un long week-end.
Géraldine Andrée
J’ai souvenance
des matins de mon enfance,
beaux comme les sous neufs
d’une bourse qui s’ouvre.
J’espérais toujours quelque chose
du scintillement d’une jeune aube.
J’avais tant de choix devant moi
que je ne savais que faire
face à la naissance
de cette lumière.
Baigner mon ours
dans la rosée fraîche ?
Suivre à bicyclette
ce sentier
pour aller à la cueillette
du trèfle mouillé ?
Déchiffrer l’alphabet
des racines qui s’enchevêtrent ?
Ou alors colorer des cailloux
de bleu, de rouge, de roux ?
J’attendais de ces matins
un véritable miracle
qui changerait mes peines
en joie,
qui détournerait le cours
des événements de la veille
jusqu’à l’embouchure
de tous les possibles,
qui multiplierait le soleil
dans une seule goutte.
Et mon coeur battait
jusqu’à l’heure de la sieste
où le rêve remplaçait
mon heureuse attente.
C’est parce que j’ai eu foi
en ces matins de jouvence
que j’écris de préférence
quand le jour commence.
Et même lorsqu’il fait noir
dans le froid qui s’attarde,
je donne à ma page le pouvoir
de devenir fenêtre
pour qu’une clarté d’enfance
puisse à mes yeux apparaître.
Géraldine Andrée
Je songe alors
que nous demeurons chez nous
à ce que la nature nous prépare
en secret
des fleurs sur des tapis d’herbe
des arbres gantés de vert
qui nous ouvrent
le chemin
un ciel qui étend
sa nappe bleue
rangée pendant
un trop long hiver
des éclats d’instant
dans l’eau de la fontaine
un air de cristal
qui tinte contre notre oreille
et surtout le miel du soleil
aux reflets roux
bien gardé au fond d’un rêve
quand nous demeurions chez nous
Géraldine Andrée
Comment faire pour voyager dans sa chambre ?
C’est facile !
Vous prenez un billet unique,
le poème,
et vous partez en calèche
avec Victor Hugo, pour le jardin des Feuillantines,
ou en train avec Arthur Rimbaud, pour la rive qui promet la vie abyssine,
ou encore de l’autre côté du
temps,
avec Robert Desnos
qui vous guide vers votre ombre.
Et quand le voyage se termine,
nul regret,
car c’est là que tout recommence.
Vous prenez un autre billet
avec votre fidèle
compagnon de route :
le silence.
Géraldine Andrée
Bonjour à toutes et tous,
Elisabet Kübler-Ross disait que l’on n’avait pas besoin d’aller en Inde pour méditer ; que l’on pouvait méditer dans son jardin ou sa salle de bain.
En ces temps d’intériorité, on n’a nul besoin de billet d’avion pour aller loin.
Il suffit de renouer avec ce pouvoir qui se cache en nous, la visualisation, pour créer un monde plus beau, plus harmonieux, où la paix précède notre naissance.
Ma chambre à moi est toute petite.
Mais si je ferme les yeux, je suis un sentier qui batifole parmi les feuilles de palmiers et d’eucalyptus et qui descend à pic vers la mer ouverte comme une grande main sur le coeur du monde.
Qu’importe que nos chambres soient petites.
Nous avons l’infini en nous.
Géraldine Andrée
Je sais une autre page
La neige
Où s’inscrivent
Tous les alphabets possibles
Celui de la patte
De l’oiseau qui passe
De la chienne
Qui attrape ses petits
Celui aussi de la brindille
Qui se pose un instant
Avant de rejoindre le souffle
Auquel elle se destine
Celui du pas du promeneur
Qui se fait seul témoignage
A l’heure où s’effacent
Toutes les preuves
Et même celui du silence
Qui fait signe
D’immense présence
Quand un autre matin se glace
Géraldine Andrée