Publié dans Atelier d'écriture, écritothérapie, L'espace de l'écriture, Un cahier blanc pour mon deuil

Atelier d’écriture thérapeutique 5 : L’écriture du deuil

L’accompagnement du deuil par l’écriture

Lorsqu’on se retrouve en deuil, on a envie de rester figé, à l’image du défunt. Et pourtant, paradoxalement, cette perte nous incite à nous mettre en mouvement… Démarches administratives, choix de la cérémonie… Les contingences de la réalité de la mort nous obligent à nous mettre en action.

Le parfait exemple est le film Voyage en Chine 1 de Zoltan Mayer, avec Yolande Moreau comme actrice principale.

Lorsqu’elle apprend le décès de son fils en Chine, Liliane – incarnée par Yolande Moreau – initie, dans le but premier de rapatrier la dépouille, ce long voyage au cœur du Sichuan où sera organisée finalement la cérémonie funéraire. Arrivée là-bas, Liliane commence un dialogue avec son feu fils par l’écriture, sur un cahier vierge où elle note tous les regrets qu’elle éprouve envers lui – ne pas être venue en Chine plus tôt, ne pas avoir fait l’effort de mieux le comprendre, ne pas avoir passé ensemble des moments de complicité -, tous ces petits deuils compris dans le grand deuil.

Puis, lors de la crémation du corps selon le rite taoïste, c’est encore une fois l’écriture qui symbolise le mouvement du deuil – par l’intermédiaire de la calligraphie. Une carte du corps du défunt est dessinée sous forme de paysage auquel le daoshi (prêtre taoïste) met le feu. Les flammes, en dansant autour d’elles-mêmes, lèchent les motifs de couleur. Tout ce qui représentait le fils de Liliane disparaît alors dans un tournoiement d’or.

Outre la perte d’un être cher, on est toujours en deuil de ce qui n’évolue plus, de ce qui est destiné à disparaître, faute de pouvoir se transformer ( rêves, projets, métier, activités, possessions, relations…).

C’est ainsi que j’ai réalisé, moi, Un Cahier blanc pour mon deuil 2 où j’ai écrit, sous forme de poèmes, tout ce qu’impliquait de départ définitif de mon père, dont notamment, les atmosphères de mon enfance que je ne retrouverais plus jamais (la cuisine, le soir, quand Il était là et qu’Il lisait son journal, les dimanches où Il bricolait tandis que je faisais mes devoirs, les arrière-saisons dans le jardin, quand Il ramassait les branchages…).

Par le déplacement de la plume sur la page, l’écriture accompagne cet inéluctable mouvement à travers la vie qu’est le deuil.

Pour cela, vous pouvez organiser avec votre stylo, sur du simple papier, une cérémonie funéraire au sujet de tout ce qui n’avance plus dans votre vie et auquel vous devez, par conséquent, dire adieu.

Notez SOUS FORME DE BULLET-JOURNAL ce dont vous devez faire le deuil :
  • Répertoriez tout ce que vous avez tant aimé, tant chéri dans la présence de tel projet, de tel bien, de tel état : « J’aimais tant cette maison. Elle était si spacieuse. Je n’oublierai jamais le matin, quand la lumière entrait par ses larges baies. » « Cet atelier d’art m’a redonné de l’élan quand la dépression me guettait. Grâce à lui, j’ai su que l’existence pouvait redevenir colorée.« 
  • Puis, faites le constat de ce qui n’évolue plus, de ce qui a cessé de croître, voire de ce qui régresse : « Cette maison me coûte si cher que je ne peux plus partir en voyage. Dans ce vaste espace, j’ai l’impression de rester cloîtrée. En vivant dans une maison qui est au-dessus de mes moyens parce qu’elle est bien trop grande, je n’expanse plus mon existence. » « J’ai cessé d’apprendre de nouvelles techniques dans cet atelier. Je tourne en rond autour des mêmes centres d’inspiration. Je répète invariablement les mêmes clichés. Ce n’est pas ainsi que je vais peindre mon propre tableau, celui qui correspond à celle que je suis devenue. »
  • N’hésitez pas à être aussi exhaustif que possible quand vous décrivez les raisons pour lesquelles vous étiez attaché à ce dont vous devez détacher aujourd’hui – et souvent, pour les mêmes raisons. Utilisez des phrases explicatives, des tournures comme car, parce que, puisque, ainsi… Détaillez vos ressentis sensoriels et émotionnels par des adjectifs précis, qui correspondent à votre vécu, et développez le vocabulaire de la subjectivité : j’aime/je n’aime plus/j’affectionnais/je déteste/ à mes yeux/cela me semble/je pense que. Vous pouvez même recourir à des questions rhétoriques dont la réponse sous-entendue vous placera face à l’évidence du choix du renoncement : « Est-ce bien raisonnable de dépenser toutes mes économies pour l’entretien de cette maison ? Mon non-épanouissement en est-il le prix ? » « N’y a-t-il vraiment que cet atelier d’art dans cette ville si culturelle ?« 
  • Faites ensuite la liste à l’intérieur de ce deuil de tous les petits deuils qu’il implique, aussi nombreux soient-ils : « les fêtes entre amis sur la terrasse », « la floraison du jardin », « les réunions entre artiste le samedi après-midi », « la compagnie d’Anne-Va, le fait que nous nous copiions mutuellement. C’était si amusant ! » Demandez-vous si ce n’est pas possible de recréer de tels moments dans un autre contexte, bien différent, qui vous permettra d’enrichir l’expérience que vous avez connue initialement et de l’éclairer sous un jour nouveau : « Je peux découvrir le jardin du Montet où je ne suis jamais allée et m’attabler à sa petite guinguette avec mes amis… Je n’aurai plus à m’occuper de rien !« 
    « Pourquoi ne pas inviter Anne-Va à peindre chez moi le jour où les enfants sont à leur club de sport ? »
  • Enfin, rendez grâce à tout ce dont vous devez inexorablement vous séparer. N’oubliez pas : si telle chose, tel être vous cause tant de tristesse maintenant, c’est parce qu’elle/il vous a apporté beaucoup de joie, de plaisir dans le passé. Ainsi est « le deuil éclatant du bonheur« , pour reprendre l’expression de Madame de Staël. Créez votre page de gratitudes et écrivez chaque remerciement avec une couleur particulière : « Merci, maison, de m’avoir apporté tant de soleil et les jours de mauvais temps, de m’avoir protégée des intempéries », « Merci, atelier, de m’avoir enseigné les théories et les techniques nécessaires à la poursuite de mon art ». Adressez-vous directement à la situation, à l’objet par le pronom personnel « tu« . Ne craignez pas d’employer l’apostrophe dont la tonalité emphatique vous permettra d’exorciser votre douleur : « Ô, Maison ! Tu fus un refuge pour mon âme quand elle allait mal ! »

Une fois ce rituel d’adieu accompli, laissez partir ce dont vous devez faire le deuil au-delà du papier, au-delà de vous-même.

En effet, ce que vous ne laissez pas s’en aller loin de vous hantera votre esprit puis votre corps par la somatisation. Tout votre être risque de devenir un sépulcre si vous ne tracez pas le chemin du deuil dont la destination est pourtant un nouvel horizon.

Alors, levez et pliez la page sur laquelle vous avez accompli les cinq exercices précédents comme si vous érigiez une maison en papier (faites de la bordure du haut un toit ; de la marge, un mur porteur ; des carreaux, un assemblage de fenêtres correspondant à vos séparations) et, à la manière du daoshi, brûlez-la en la regardant doucement se consumer.

Si ce n’est pas possible – faute d’endroit et de sécurité adéquats -, posez votre maison en papier dans une boîte – à chaussures, par exemple – et enterrez-la dans un recoin reculé.

Si ce n’est toujours pas possible – vous n’avez pas de jardin ou il vous faut une voiture pour atteindre un coin tranquille, loin de la ville, alors que vous n’êtes pas motorisé, par exemple -, déposez la maison en papier dans un tiroir que vous n’ouvrez jamais, dans une armoire secrète ou en haut d’une étagère.

Puis, vivez
en avançant d’instant en instant
et en écrivant jour après jour
comment vous allez…

Géraldine Andrée

1 Une traversée initiatique du deuil

2 Un Cahier blanc pour mon deuil

Publié dans Poésie, Poésie-thérapie, Un troublant été

Je suis une enfant de l’été

une enfant de la lumière qui danse sur les branches du noisetier

une enfant des glaces à la pêche et à la vanille

une enfant de la vague qui se faufile la maligne entre les lanières des sandales

une enfant de ce baiser partagé au bord de la fontaine tête renversée

une enfant des prunes éclatées

une enfant de cette histoire d’amour derrière les persiennes closes

une enfant du jardin que la chaleur rend muet

une enfant des roses arrosées tôt et dont la constellation de gouttes brille avant d’être éteinte par le soleil d’août

une enfant des herbes folles qui dispersent les paroles

une enfant des ombres entremêlées qui s’attardent sur le sentier bleu ajoutant à l’instant un mot d’adieu

une enfant du premier poème tapé à la machine à écrire Royale

et de sa feuille détachée du rouleau tel l’ultime pétale

C’est la rentrée

Il te faudra exister même quand les jours seront courts

garder dessiné en toi ce sourire d’aujourd’hui

pour que tous les hivers à vivre te soient infiniment doux

Géraldine

Publié dans Atelier d'écriture, Au fil de ma vie, écritothérapie, Histoire d'écriture, L'espace de l'écriture, Récit de Vie

Atelier d’écriture thérapeutique 4 : les sept bienfaits de mes pages quotidiennes

Les pages de mon journal intime m’ont toujours été d’un grand soutien. Je vous énonce ici les sept raisons :

  • Quand je me sens incomprise, la page, elle, m’écoute. Elle m’accueille inconditionnellement dans sa blancheur. Son silence n’est qu’une illusion. En ayant recours à elle chaque jour, il me semble que j’entre dans le calme immense d’un paysage de neige. Une voix me parvient plus douce, plus proche, plus feutrée. Cette voix, c’est ma voix de toujours, une voix de sagesse secrète et ancienne que me renvoie la page lorsque j’y chemine. Je deviens une promeneuse accompagnée par mes traces les plus fiables. Et je sais que j’ai été entendue par ce silence bien plus grand que moi quand les rêves que j’y ai inscrits se réalisent, qu’il se produit une parfaite synchronicité entre le mot et l’événement, entre ce que j’ai noté et ce que l’univers me retransmet dans son écho miraculeux.
  • Quand je me sens perdue, la page me remet sur mon chemin, non pas sur « le droit chemin », mais sur le chemin qui est juste pour moi. Je peux alors me retourner en toute confiance, voir la route que mon empreinte a tracée dans l’inconnu et si je m’aperçois que je me suis égarée, marcher à nouveau dans cette empreinte pour voir quand j’ai bifurqué, ceci afin de reprendre le chemin qui est le bon pour moi. C’est bien parce que la page quotidienne m’invite à faire des retours sur moi-même, à revenir régulièrement sur mes pas qu’il m’est impossible de régresser dans mon existence.
  • Quand je sens que mon ego enfle, la page me montre que rien n’est permanent – ni les honneurs, ni les humiliations ; ni les acquisitions, ni les pertes ; ni les joies, ni les peines. J’en veux pour preuve le miroitement de l’encre qui se ternit au fur et à mesure qu’elle sèche. Le chagrin noté hier se présente en tant que consolation aujourd’hui. La peur décrite au petit matin, après une nuit difficile, s’est cicatrisée sous forme de phrase. L’amant dont les lèvres, les mains ont été célébrées dans un si long poème au feuillet 8 est oublié à la fin du cahier car la conscience de la floraison du laurier a désormais envahi tout l’espace. La page témoigne de la permanente évolution de mon être. Et ce qui est extraordinaire, c’est qu’elle est la plus fiable messagère de mon histoire.
  • Quand je sens sous ma main la présence fine et frêle du papier, je me demande si cette simple feuille sera capable de supporter le poids de mes remords, de mes regrets et de mes doutes sans se déchirer. Pourtant, j’ai beau barrer, griffonner, raturer mes pensées d’un trait rageur, la page résiste. Elle ne plie pas. Elle demeure accrochée aux anneaux du cahier. Et si c’est moi qui décide de la détacher, elle s’envole, aussi légère qu’une aile d’oiseau, emportant par la fenêtre ouverte sur le jardin tous les fardeaux de ma condition humaine. En m’incitant à me pencher sur elle chaque jour, dans une posture d’écrivaine qui ressemble fort à une posture de priante, la page m’empêche de ployer sous l’apparente fatalité des événements.
  • Quand je sens que dans une discussion, je fais fuir les gens parce que j’ai trop tendance à parler de moi, je m’en retourne à la page qui, elle, ne me fait jamais défaut. Je peux lui confier inlassablement tous mes problèmes pendant toute la nuit… Il y aura toujours une page suivante afin de m’aider à y voir plus clair. Il suffit d’ailleurs de tourner la page pour renouveler l’attention du papier, m’accorder davantage de force et de concentration, renforcer la puissance de mon intention et de ma foi. Et un beau matin, je m’aperçois que j’ai vraiment tourné la page sur cette trahison, ce deuil, cette déception, cette épreuve… Je suis comme neuve pour aborder le chapitre de ce jour qui s’annonce.
  • Puisque tout au long de mon écriture, j’ai acquis la certitude que mon être est en perpétuelle métamorphose, je sais que la page accompagne cette métamorphose, en se transformant elle aussi. Chacune est le miroir de l’autre. Lorsque mes textes deviennent des poèmes colorés, des calligrammes, des affirmation positives, je sens que la page reflète la santé de ma dimension psychique et elle se fait quasiment enluminure. Les mots m’envoient leurs images. Enfin, je suis l’héroïne d’une aventure palpitante et intéressante : ma vie. Je reviendrai sur ce thème dans un prochain billet !
  • Quand je suis l’indéfectible amie de la page, c’est-à-dire que je suis fidèle envers elle chaque jour, je me sens récompensée au-delà de mes rêves les plus fous et de mes plus ardents désirs. J’oublie, en effet, que je tiens le stylo, que je touche le papier et donc, que j’écris. L’écriture n’est plus que traversée, mouvement. Et je suis la voyageuse de cette écriture. Je laisse derrière moi les contingences du voyage – voici encore quelques feuillets mais le cahier se termine, il faut en prendre un autre, la cartouche d’encre se vide, ai-je pensé à préparer la suivante ? etc – pour m’abandonner complètement à l’écriture comme à une amante. C’est d’ailleurs elle qui décide du trait comme de la caresse – plus prolongé, plus appuyé ou simple effleurement… Parce que je la laisse faire dans une intuition primordiale, un instinct de confiance initial, l’écriture écrit la vie à travers moi. L’écriture m’écrit.

Et vous ? Quels sont les bienfaits que vous apportent vos pages, vos toiles, vos partitions ? Comment vous permettent-elles d’être vous-mêmes (m’aime) de jour en jour ?

Géraldine Andrée

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Je vous écris depuis ce pays

Voyage au pays de la dyslexie

Beaucoup de personnes dyslexiques croient qu’elles n’ont pas le droit d’écrire leur autobiographie parce qu’elles sont dyslexiques.
Je dirais que c’est parce qu’elles sont dyslexiques qu’elles ont le droit – et même le devoir – d’écrire leur autobiographie.

En effet, il n’y a pas de témoignage plus poignant que celui qui consiste à évoquer son mal à dire, pour la bonne raison que c’est de la confrontation avec l’indicible que naissent les ouvrages les plus évocateurs sur le fascinant chemin de la résilience. Je vous renvoie pour cela à mon billet Le cahier de l’indicible.

Je crois profondément que ce mal à dire propre à la dyslexie est provoqué, en vérité, par la société elle-même qui crée des codes d’écriture inhérents à son fonctionnement, somme toute, bien artificiel. Or, n’oublions pas que, dans ce domaine, le maître mot est relativisme. Pourquoi ? Car, tout simplement, d’autres cultures écrivent autrement. Par exemple, nous écrivons, dans notre société occidentale, de gauche à droite, selon notre perception linéaire du temps. Mais d’autres cultures perçoivent, elles, le temps comme étant circulaire (de même que les théories de la physique quantique qui corroborent la thèse selon laquelle le temps se multiplierait à l’infini en anneaux, boucles ou spirales). En outre, les cultures orientales pratiquent, elles, la graphie de droite à gauche. Vous pouvez essayer d’écrire ainsi. Tentez l’expérience ! Vous verrez que votre écriture sera particulièrement riche en réminiscences sensorielles parce qu’une partie de votre cerveau, davantage sollicitée, vous permettra de lâcher prise sur les normes conventionnelles, laissant ainsi s’exprimer votre inconscient sur la page.

Si les personnes dyslexiques se sentent mises sur la touche par notre société, c’est parce que leur façon de dire et de représenter le réel n’entre pas avec les critères traditionnels en vigueur. Elles sont, par conséquent, enfermées dans des préjugés ou des pensées limitantes venus de l’extérieur qu’elles introjectent malgré elles. Or, comme le dit, le docteur Olivier Reval dans son ouvrage La Fabrique à bonheurs :

« Les enfants dys sont des enfants intelligents qui souffrent de ne pouvoir ni le montrer, ni le prouver. Leur capacité d’apprendre est différente, leur volonté d’apprendre est identique. » 

Autrement dit, la société doit changer son regard sur la dyslexie et respecter le fait que d’autres individus empruntent des chemins différents vers la connaissance de soi et du monde. C’est à la société d’entrer dans le pays de la dyslexie et non à la dyslexie de tambouriner aux portes de la société pour faire entendre sa voix unique.

Malheureusement, comme il est dit dans l’ouvrage que nous avons coécrit ensemble, Axel Ménard-Burgun et moi, la dyslexie est

Pourtant, si le pays de la dyslexie existe, il est riche, comme tout pays, de sensations, d’émotions et de sentiments que chacun gagnerait à découvrir. Et ce pays, c’est celui du cœur à partir duquel la personne dyslexique peut écrire, parler, s’adresser à ses frères humains, selon l’expression de l’écrivain Albert Cohen. Or, qu’y a-t-il de plus profondément intime qu’un cœur ? Si l’on n’est pas en contact avec ce cœur, le langage n’est d’aucun secours. Il fonctionne comme un système stérile, dénué de sens, c’est-à-dire de signification et de direction.

L’autobiographie est l’endroit où peut s’exprimer ce cœur.

Comment, concrètement ?

Les recherches en neurosciences prouvent aujourd’hui qu’il existe plusieurs formes d’intelligence – dont une intelligence capitale, celle qui permet de se relier aux autres au-delà de la simple communication, l’intelligence émotionnelle.

Ensemble, nous allons, vous et moi, relater dans votre livre de vie ce voyage à travers cette intelligence émotionnelle dont une personne dyslexique est richement dotée. Nous mettrons donc l’accent sur votre paysage sensoriel et émotionnel. Je vous livre ici quelques pistes d’écritothérapie possibles:

  • Pour que vous puissiez vous sentir en sécurité dans notre processus d’écriture, nous allons partir d’un lieu – imaginaire ou réel ; passé, présent ou futur – où vous percevez votre paix, un lieu-refuge d’où tout jugement et toute auto-critique sont bannis. Nous n’hésiterons pas, pour cela, à convoquer un dessin, une image, un tableau ou à vous permettre de vous relaxer en fermant les yeux, afin que vous puissiez mieux vous représenter ce pays de sérénité absolue.
  • Si la dyslexie est/ a été vécue comme une douleur par les différents types de rejets sociaux qu’elle a engendrés, nous pourrons exorciser cette douleur avec des onomatopées, des comparaisons brutes, jamais censurées, des jeux sur les sonorités : « Le serpent s’enroule autour de ma langue. Langue ligotée. Langue ligaturée. Langue à délierQuand les langues se délient, elles sont libres. Je rêve d’une langue déliée. » 
  • Dans ce cas, nous pouvons délier cette langue en rendant aux émetteurs leurs messages négatifs sous forme de dialogue théâtral ou de lettre fictive que nous intègrerons éventuellement dans votre livre de vie.
  • La dyslexie étant éprouvée de l’intérieur avant d’être perçue par l’extérieur, votre sensibilité aux stimuli négatifs et positifs est supérieure à la moyenne. Nous cheminerons ainsi sur la route de vos émotions en les assimilant à des sensations concrètes : le sel de mon envie de vivre, le picotement de la joie, le rouge abricot de l’espoir, la peau de mon chagrin, la ronde des papillons noirs de la peur, l’alezan de ma colère…
  • Dans le pays de la dyslexie, rien n’est interdit ; tout est autorisé, inconditionnellement accepté, y compris les néologismes les plus fous. Alors, on laisse de côté les règles orthographiques et syntaxiques trop bloquantes ; on oublie le censeur que l’on perçoit dans le regard d’autrui pour laisser libre cours à l’exploration du langage. Aussi, on n’hésitera pas à faire d’une erreur langagière une opportunité de créativité, une ressource poétique inattendue qui a tant à nous révéler sur l’univers de l’esprit. « Deumain a deux mains, les miennes. »

Toutes ces marques originales de votre être peuvent jalonner votre aventure de vie, faite non seulement de défis, mais aussi de victoires.

Je pense que le pays de la dyslexie nous montre à tous le moyen de nous réinventer, de sortir des cadres trop conformes, des marges trop sclérosantes, des lignes trop limitantes pour donner à notre parole un nouvel envol vers autrui. Il développe la générosité inhérente à la curiosité.

Alors, jouons. Débordons des marges. Échappons-nous des cadres. Avançons entre les lignes afin que votre autobiographie évoque la vie de votre voix avant tout.

Les personnes dyslexiques qui nous précèdent dans ce voyage nous tracent la route !

Si vous souhaitez découvrir un itinéraire singulier qui mène au pays d’où l’on écrit, écoutez ce que ce cœur a à vous dire :

Géraldine Andrée

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Atelier d’écriture créative 3 : Le rendez-vous clandestin

Que de temps pour le désirer, ce rendez-vous clandestin !
Que de luttes pour parvenir à se libérer ; que de combats pour se détacher des exigences de ses proches !
Au milieu des cris des enfants, des protestations du conjoint, du linge empilé, des miettes de biscotte sur la table, accepter enfin cette évidence : « Si tu n’oses pas, personne ne le fera pour toi ! »
Se considérer comme responsable de ses choix… Et tant pis pour ce qu’ils pensent… « Mère égoïste, épouse individualiste »… Son libre arbitre est sa seule lumière.
Violent, ce besoin de s’échapper loin… Violent, oui, mais vital !
Alors, que de courage pour être honnête envers son cœur ! Que de force pour trouver cette excuse, somme toute, très banale :
« Je vais faire une course ! »

Puis, enfiler son manteau ; chausser ses bottines ; saisir son sac et son parapluie ;
puiser dans la témérité de cet appel vibrant de soi à soi pour affronter la pluie, le vent, le soir qui tombe, les flaques, l’incivilité des passants, le ballet des voitures, l’énervement des klaxons, les chaussées noires, les artères bouchées où l’intention de traverser multiplie par deux le risque de se faire renverser…
Attendre sous un abri de bus que la pluie cesse un peu avant d’atteindre le digicode de l’immeuble.

Appuyer sur le bouton de l’ascenseur qui clignote dans le hall.
Bientôt le septième étage.
Le plus dur est fait…
Et voici le minuscule studio lumineux comme la lampe d’Aladin.
La voici redevenue elle-même, une fois la porte close sur le parapluie secoué.
Elle a rejoint l’île du silence.

Dans le miroir, elle se regarde, se sourit, ôte son manteau gris, dénoue ses cheveux mouillés, pose sur la petite commode en osier sa barrette argentée.
Quelle histoire pour en arriver là !
Quelle aventure jusqu’à ses yeux !
À la porte de sa poitrine frappe ce cœur qu’elle a ignoré pendant trop longtemps.
Elle se déchausse, envoie ses bottines aux quatre coins de la pièce, retire son pull qu’elle roule en boule.
Elle est là, pieds nus sur la moquette douce, en chemise de dentelle.

Alors, elle ouvre son sac à main, sort le carnet de cuir, le stylo orné d’un pompon rose, s’étend sur la couverture en mohair, fait sauter l’élastique du carnet et à la page cinquante-sept,

elle se sent prête
pour son rendez-vous avec l’amant
sur le lit blanc
de la page qui l’attend.

Et vous, comment se passent vos rendez-vous avec votre passion, votre activité préférée, votre art favori ? Vous faut-il lutter pour arracher ces moments au temps ou ceux-ci coulent-ils de source ? Que ressentez-vous ? Comment vous retrouvez-vous ? Quelles sont les sensations et les émotions qui vous traversent ? Y a-t-il un endroit à part, où vous vous sentez bien ou devez-vous intégrer cette parenthèse à votre quotidien ? Vous pouvez me raconter votre histoire de retrouvailles avec vous-même en commentaire !

Géraldine Andrée

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Au fil de l’encre

Je songe à l’encre qui s’est écoulée depuis les deux premiers mots du journal de mes quatorze ans :
Chère amie...
Je ne savais pas alors que chaque lettre m’éloignait de tout ce qui était encore bien présent :
le chat à la fourrure d’argent, les fleurs rouges du marronnier sous la fenêtre de ma chambre, les mains de ma mère dans la pâte, le visage de mon père éclairé par la lampe tandis qu’il cherchait à résoudre un problème de géométrie, la mésange bleue qui picorait sur le bord de la véranda au début du printemps.
Chaque trait m’annonçait une ride.
Je me demande aujourd’hui si je n’ai pas plus écrit que vécu…

Et pourtant, lorsque je songe à tous ces cahiers traversés,
je m’aperçois que l’écriture est une rivière dont le cours s’inverse naturellement.
Le fil de l’encre me ramène le saut du chat – ce vif-argent – entre les feuilles, le marronnier qui m’envoyait l’un de ses pétales par le rayon de soleil de ma fenêtre, la pâte enfin pétrie et prête à être dorée au four, ma mère qui secouait ses mains pour disperser les grains de farine, le sillon qui creusait le front de mon père quand il approchait de la solution, la mésange envolée qui ne m’aura laissé que le souvenir de son éclair bleu dans une matinée blanche.

Je vois tout cela mieux que jadis dans l’embrasure de mon cahier ouvert.
Je suis désormais sensible à la lumière de toutes ces choses et de tous ces êtres feus.
Et aujourd’hui, je l’affirme :
j’ai beaucoup écrit pour revivre ce que le courant du temps a effacé.
Même les premiers instants où j’ai commencé un journal me sont rendus :
l’instant de chacun de ces mots qui brillent comme si je venais à peine de les tracer,
quand la phrase se poursuit :
Chère amie, je te dois la vérité…

Géraldine Andrée

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What’s your story ?

Et toi ? Quelle est ton histoire ? Je peux t’aider à la choisir et à l’écrire !

« Comment retrouver le fil de sa vie ? Mot après mot, en se confiant à la page, en la considérant comme un miroir qui nous permet de mieux nous connaître. Au fil des exercices proposés, vous parviendrez à devenir l’auteur de la vie que vous souhaitez, autrement dit de votre propre histoire. »

Géraldine Andrée