Enfant, je laissais toujours des petits mots aux autres lorsque je m’éloignais :
« Je lis dans le jardin »,
« Je suis à l’intérieur du noisetier »,
« Je vais chercher un livre au centre commercial »,
« Je suis tout au fond de mon rêve. Ne me dérangez pas. »
Bien plus tard, à l’âge de trente ans, après une violente rupture amoureuse – promesse de mariage annulée, un appartement rien que pour moi – et après avoir été abandonnée par tous les amis communs au couple, je me laissais des petits mots, le soir, au-dessus de ma tasse de petit déjeuner et que je lisais avec délectation le lendemain matin, avant d’aller travailler :
« Je te souhaite une bonne journée. On ira au cinéma, ce soir. »
« À tout à l’heure ! Prends soin de toi ! »
« Courage ! Tu vas réaliser tes rêves ! »
« Rien ne dure. Mais garde en souvenir la joie ! »
J’en ai collé ainsi des posts-it, frêles morceaux de papier ou fragments de feuillets arrachés d’un vieux carnet à spirale inutilisé. J’avais l’impression de consteller mon espace d’un peu de mon être à chaque fois et, ainsi, de reconstituer mon unité narcissique.
Les petits mots m’ont aidée à traverser la vie. Je m’en écris tous les matins sur mon journal intime. Mais j’aime aussi en disséminer chaque jour dans ma maison qu’est mon site ou cette page L’Encre au fil des jours car c’est ainsi, je ne peux voguer au fil de chaque journée sans laisser derrière moi quelques pétales, réflexions, poèmes, pensées qui ne demeurent qu’en dansant sur un instant, avant de disparaître comme moi – jusqu’au lendemain peut-être, si d’aventure, quelqu’un d’autre les trouve tels que je les ai laissés.
Géraldine Andrée
Partagez en toute complicité !
WordPress:
J’aime chargement…